vendredi 26 mars 2010

Affaire SDB/Novescia : les réactions du Dr COTE et du SDB...et une surprise de taille.

Chers Amis, bonjour.

L'actualité biologique s'accélère d'un coup.
Un post précédent faisait référence à l'entrée dans Novescia d'un biologiste, membre du conseil d'administration et du bureau du SDB. Ce confrère a souhaité légitimement réagir.  Il a laissé un commentaire que je reproduis ci-dessous comme droit de réponse.

"Bonjour,

J'ai démissioné du Bureau du SDB le jour de ma prise de fonction sde dircom Novescia.
Je me présenterais d'ici quelques mois devant le CA, organe consultatif, pour explications
Donc : IL N'Y A PAS DE CONFLIT D'INTERET.
Juste une reflexion à mener dans la profession sur la diversité et l'analyse fine des structures sans dogmatisme.
Cordialement

Thierry COTE
Biologiste"

Au même moment, le président du SDB, le Dr Jean BENOIT, publiait sur le site du syndicat un communiqué. Il y explique la position du SDB sur ce dossier et concède, en des termes diplomatiques, "l'influence grandissante et néfaste des réseaux financiers au sein de la biologie médicale". Voici la version intégrale du communiqué :

"Chers confrères,
La démarche personnelle d’un confrère, membre des instances du SDB, de céder son laboratoire au groupe Novescia sans que nous en soyons informés ne saurait remettre en cause l’investissement de notre Syndicat à défendre notre exercice et son indépendance vis-à-vis des groupes financiers. J’ai d’ailleurs immédiatement demandé à ce confrère de démissionner du Bureau et du Conseil d’Administration du SDB.
Nous regrettons le choix fait par ce confrère qui relève d’un strict choix personnel et témoigne s’il en était encore nécessaire de l’influence grandissante et néfaste des réseaux financiers au sein de la biologie médicale française.
L’amalgame fait par certains entre le SDB et ce confrère est pour le moins malhonnête et ne nous empêchera pas de travailler à faire avancer nos positions au niveau de l’Europe et au travers des modifications que nous souhaitons de la législation française.
Jean Benoit
Président
(25/03/2010)"

Ces deux communiqués confirment que l'environnement de la profession est devenu particulièrement complexe avec des fortes incertitudes sur le modèle actuel (voir l'appel d'Aurélie publié ici même). Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que l'un des plus gros laboratoires spécialisés français, Pasteur-CERBA, est mis en vente par ses propriétaires. C'est une surprise de taille. Il est encore difficile d'en imaginer les conséquences mais elles seront nombreuses.

GdM



jeudi 25 mars 2010

Ordonnance sur la Biologie médicale : Aurélie monte au créneau.

Amis Biologistes, bonjour.

Je vois vos sourcils se lever d'un air interrogateur : mais qui est donc Aurélie ? Aurélie est une Interne en 3ème année en biologie médicale et m'a contacté via le blog pour  me donner son avis (engagé) de jeune biologiste sur la réforme en cours. Elle est directement concernée puisque l'année prochaine elle devrait exercer en tant que professionnelle et les perspectives qui lui laisse l'Ordonnance ne la réjouissent pas vraiment. Son discours, tant sur la forme que sur le fond, mérite à mon avis une large diffusion. Je lui ai donc proposé de un interview pour Labmutation, ce qu'elle a accepté à condition de respecter son anonymat.  Chose promise, chose dûe.
GdM. Bonjour Aurélie, allons droit au but, voulez-vous ? Vous m'avez exprimé votre vive inquiétude au sujet de l'arrivée des groupes financiers dans la biologie médicale. Expliquez-nous pourquoi.
"La biologie libérale française, de par son exercice praticien, individuel et déontologique est une exception européenne. C'est cette notion de laboratoire de proximité, cette exception française que nous pensons aujourd'hui menacée par l'arrivée de capitaux extérieurs dans la profession. Des holdings nationales et étrangères, des compagnies financières, sont attirées par la rentabilité promise par la concentration des laboratoires. Le seul objectif de ces groupes financiers est la rentabilité de leurs placements et la réalisation d'importants profits en restructurant massivement les laboratoires français. Ce marché représente des milliards d’euros et est rendu solvable par l’assurance maladie. Que demander de plus ? Et pour arriver à leurs fins, tout est bon : plaintes contre l’Etat français, perquisition de l’Ordre des Pharmaciens, intimidations, propagande dans la presse… Des méthodes indignes pour des soit disant altruistes du monde de la santé."
GdM- Selon vous, quelles conséquences cela pourrait il donc y avoir pour les patients français ?
"Soyons clairs. En industrialisant la profession, on va déconnecter toutes les phases de l’analyse médicale, les prélèvements vont faire des kilomètres par coursier pour rejoindre le lieu où ils seront analysés, faisant courir le risque de manquer les vraies urgences. La validation biologique se fera à distance, les biologistes en bout de chaine devront déléguer et engager leur responsabilité à toutes les étapes sans réellement pouvoir les maîtriser. Ces regroupements seront source de chômage pour des personnels de santé qualifiés, comme les techniciens de laboratoire. De nouveaux métiers vont apparaitre comme les manageurs, les directeurs de ressource humaine, les visiteurs médicaux, parfaitement inutiles actuellement. Les sites non rentables seront fermés ou déplacés du centre ville vers les zones industrielles. La baisse de nomenclature sera compensée par une hausse des volumes ce qui n’induira aucune économie pour la Sécurité Sociale. Le risque majeur est la sortie progressive du champ de prise en charge par l’Assurance Maladie des analyses médicales. Comment accepter à terme que la solidarité nationale aille alimenter en dividendes des fonds de pensions étrangers ? Les patients français étaient, et sont encore, satisfaits de leurs laboratoires d’analyse. On prend le risque de tout anéantir pour céder aux lobbyistes financiers qui vont constituer de vrais empires."
 GdM- Comment comptez-vous, en tant que jeune biologiste, empêcher cette dérive ?
"Les jeunes biologistes, soutenus par l’ensemble des syndicats de biologistes ont été reçus à plusieurs reprises par le gouvernement afin de faire valoir la nécessité de préserver ce secteur de santé. Le préserver ne signifie pas le protéger dans une vision corporatiste du métier. Les biologistes sont prêts -et ils l’ont prouvé- à intégrer qualité, efficience et maîtrise des couts dans leur exercice quotidien dès lors que leur permet de rester maitre de leur décision et propriétaire majoritaire de leur outil de travail. Un décret d’application permettant de combler pour les professions de santé le vide législatif ouvert par l’article 5.1 de la loi n°90-1258 sur l’exercice en SEL des professions libérales. Prendre ce décret serait un geste fort : il fermerait  la possibilité à des investisseurs extérieurs à la profession de contourner la loi pour réaliser des montages leur permettant de détenir  jusqu’à 99% du capital des laboratoires."
GdM- Vaste programme ! Ce décret est reclamé depuis 10 ans et jusqu'à présent seuls les Avocats ont réussi à obtenir le leur. Qu'attendez-vous de concret pour 2010 ?
"Que l'Etat s’engage pour nous. Qu'il mette tout en oeuvre pour aller dans le sens d’un exercice praticien, indépendant et éthique pour notre génération. Qu’il donne à la France la chance de pouvoir maintenir ce réseau de laboratoires de proximité qui fait que chaque Français peut sans mal trouver un laboratoire d'analyses, et, surtout, un expert, passionné par son métier, à même non seulement d'effectuer les examens biologiques prescrits, mais surtout de le renseigner, le conseiller, le rassurer ou alerter son médecin en cas de nécessité. Les biologistes sont des praticiens qualifiés bac+10. Leur responsabilité professionnelle est engagée à travers les actes médicaux qu’ils réalisent. Ils veulent et doivent rester seuls maîtres de leur gestion et de leurs investissements, leurs préoccupations étant par essence même différentes de celles des financiers. La France peut et doit faire valoir son modèle d’exception que certains pays européens reconnaissent lui envier. Dans ces pays, la pression des holdings est telle qu’il leur est impossible de revenir vers une biologie à caractère plus humain. Ne commettons pas la même erreur."
GdM- Ok mais quand aurez-vous l'occasion d'exprimer vos revendications à la tutelle ?
"Et bien cher GdM, vous avez l'exclu pour Labmutation. Ce samedi 27 mars, une table ronde est organisée par la FNSIP avec Michel Ballereau à la Faculté de pharmacie de Paris V (4, avenue de l'Observatoire Paris 6ème - de 14h à 15h). Madame Bachelot a promis d'y participer en video-conférence. Les jeunes biologistes auront ainsi une belle occasion à saisir. "
GdM (nostalgique)- Je n'y serai hélas pas mais je compte sur vous pour tenir les lecteurs du blog informés.
"Promis. Laissez votre smartphone allumé"

Amis Biologistes, la relève est bel et bien assurée mais dommage que les anciens préfèrent céder leur laboratoire aux groupes financiers. Gardez le contact.

GdM



mardi 23 mars 2010

Biologie médicale : une mésentente inquiétante se profile à l'horizon.

Amis Biologistes, bonjour.

Il n'y a vraiment pas de quoi se réjouir car la biologie médicale traverse une  sacrée mauvaise période. Après la mise en place d'une "résistance" sous forme d'une pétition par une fraction de biologistes qui ne souhaite pas clairement se révéler (voir le post), un conflit d'intérêt patent au sein du principal syndicat de biologistes (voir le post) voilà qu'un syndicat hospitalier exprime clairement et en des termes -disons- peu amènes son avis sur la pétition citée plus. Il s'agit du message du président du syndicat que je reproduis ci-dessous mais qui est accessible sur le site http://www.snbh.asso.fr/ :

"je (sic) te serais reconnaissant de ne pas signer la pétition "biologistesencolère" qui circule. Cette pétition émane des membres, les plus conservateurs et rétrogrades, d'un syndicat privé qui ont pour seul objectif que rien ne bouge, que rien ne change et que rien n'évolue ...

Ce sont les mêmes qui, lors des réunions de concertation qui se sont déroulées au Ministère depuis mars 2008, n'ont rien refusé ni critiqué (à l'exception de l'ouverture du capital) mais qui se rattrapent dans les dîners en ville pour geler les décisions qui ne leur conviennent pas; cela a très bien marché avec la direction de la Sécu pour bloquer toute évolution de la NABM comme l'introduction à la nomenclature des analyses BHN.
Mais ces pratiques n'ont pas suffit, cette fois, pour bloquer la parution de l'ordonnance, d'où la lettre "anonyme"et la pétition du même nom !

Avec cette réforme le plus difficile est certes devant nous mais le plus passionnant aussi. Nous réalisons une biologie médicale de grande qualité, n'ayons pas peur de le prouver. nous sortirons tous, nous biologistes et nos équipes, grandis par ce challenge.

  Le Président du SNBH
"

Je suis très étonné par ce message aussi bien sur la forme que sur le fond et c'est bien la première fois que je vois des syndicats professionnels régler le compte de la sorte  par Internet interposé. Si c'est une manipulation, le timing est plutôt bien choisi, c'est-à-dire juste avant la sortie de certains textes réglementaires courant avril (comme l'annonce d'ailleurs le SDB sur son site internet mais aussi et surtout le passage de l'Ordonnance devant le parlement (15 avril).

Les anciens disaient en latin "divide et impera" : diviser pour mieux régner, ce que Wikipédia  décrit (désolé j'ai la culture que je peux) comme une stratégie gagnante visant à réduire des concentrations de pouvoir en éléments qui, pris individuellement, ont moins de puissance que celui qui implémente la stratégie.

Question : qui implémente ladite stratégie ?
GdM

PS : Merci à Totsaki pour l'info.




lundi 22 mars 2010

Novescia débauche un pilier du SDB.

La nouvelle vient de tomber et elle agite déjà le landernau de la biologie, alors même que la profession est en proie à une douloureuse réorganisation.  Un des élus nationaux du SDB, plus important syndicat de biologistes, a été recruté comme porte-parole du groupe Novescia.

Le communiqué de presse diffusé par le groupe (dont le PDG est issu de la Générale de Santé) insiste sur les responsabilités syndicales de ce biologiste. De nombreux confrères et consœurs s'en sont émus considérant qu'il s'agit-là d'un  réel conflit d'intérêt.  

"M. C. rejoint le groupe Novescia en qualité de directeur de la communication.
 Novescia est le leader français de la biologie médicale, regroupant des laboratoires d’analyse de biologie médicale dans toute la France. Né en 195.. , M. C. est biologiste, ancien interne en pharmacie des Hôpitaux de Paris, ancien élève du Master « Gestion et Politiques de Santé » à  Sciences-Po Paris.
 Il ouvre son propre laboratoire en 1988. En 2003, il participe à la première fusion de laboratoires de biologie médicale à Paris.
Depuis 1990, M. C. a été également le porte-parole, puis l’un des élus de la principale instance syndicale de la biologie. Dans ce cadre, M. C. a engagé une réflexion et une action sur l’évolution des politiques publiques de santé en général, et de la biologie médicale, en particulier"

Pour l'instant le SDB n'a pas communiqué sur le sujet et nous ne savons pas à l'heure où nous écrivons ces lignes si ce biologiste va démissionner de ses fonctions syndicales. 

Belle prise.

GdM

dimanche 21 mars 2010

Pourquoi les Femmes ont-elles besoin d'un (vrai) laboratoire d'analyses médicales près de chez elles ?

Toutes les Femmes ont besoin d'un laboratoire d'analyses médicales à proximité de leur domicile ou de leur lieu de travail. Pourquoi ? Parce que la Sécurité Sociale est formelle, ce sont les premières consommatrices d'analyses. Pas par plaisir mais par obligation.

Vous êtes sceptique et vous voulez des exemples, soit.  Qui a souvent besoin d'une analyse d'urines ou d'un test de grossesse ? Les femmes. Où vont-elles les faire ? Dans le laboratoire du coin. Je ne vous parle pas des diverses explorations hormonales qu'elles doivent parfois réaliser et plus tard des analyses dont à un moment ou un autre ont besoin leurs enfants. J'oublie de citer les bilans obligatoires de la grossesse et ceux que prescrivent les gynécologues lors de la ménopause. Je fais aussi l'impasse sur certaines affections longue durée de type auto-immun qui touchent souvent les femmes et qui nécessitent un bilan régulier.

Certes, me direz-vous, mais un bon centre de prélèvement ne ferait-il pas l'affaire ?  Non, mille fois non car l'expérience montrent que souvent le Biologiste et le Médecin coopèrent et discutent des résultats d'analyses de leurs patientes ce qui ne serait techniquement pas possible si elles ont affaire à un centre de prélèvement anonyme qui envoie les analyses à un gros plateau technique. Pour parler le jargon biologique, la phase post-analytique ne serait pas  optimale.

Mesdames, Mesdemoiselles, poussez la porte de votre laboratoire de quartier et demandez à parler aux Biologistes. Ils vous accueilleront avec plaisir et vous expliqueront pourquoi la profession (et donc votre accès aux soins) est menacée.

GdM
(a mis des fleurs dans la salle d'attente)


PS : J'ai versé une larme pour ce 9ème grand chelem. Bravo les gars !



mercredi 17 mars 2010

Ordonnance sur la biologie médicale : une résistance s'organise.

Amis biologistes, bonjour.

Une coordination appelée "Biologistes en colère" et qui se définit comme "une initiative non syndicale et regroupant de biologistes, syndiqués ou non opposés, à la réforme engagée par l'ordonnance" a lancé un site internet (www.biologistesencolere.com) et une pétition.

D'après certaines sources bien informées, il semblerait que ce soit des Biologistes du sud de la France qui aient lancé l'initiative, soutenus par le très actif SJBM.
Au delà de la signature de la pétition, ils appellent les biologistes à s'inscrire sur la liste de diffusion Biomed.

GdM

PS : les deux questions du jour, combien de labos vont rester en 2013 ? combien coûte réellement une accréditation ? Si vous avez les réponses précises...

mardi 16 mars 2010

L'Ordonnance de la biologie à l'épreuve du terrain -1

Amis Biologistes, bonjour.

Le nouveau contexte législatif de la biologie médicale se confronte au réalités du terrain. Les biologistes s'approprient le texte de l'ordonnance, le lisent , l'interprètent et les questions émergent les unes après les autres. Qui peut répondre à ces questions ?
Le problème est que le recours juridique est assez limité. Pour l'instant, il n'y a que deux institutions qui ont un(e) juriste bien identifié(e) : l'Ordre des pharmaciens et le SDB. Ce n'est pas suffisant. En attendant, il faut centraliser les questions, les regrouper et les classer par importance et thème. Dans cette optique, je publie le post d'un biologiste de terrain qui nous interpelle sur la responsabilité des biologistes concernant les prélèvements. Le problème est de taille, si vous avez des suggestions et commentaires, rendez-vous à la fin du post.

GdM

"Un débat pourrait s’ouvrir sur la responsabilité de l’acte de prélèvement. On en parle peu mais la délégation du prélèvement auprès des auxiliaires médicaux tout en en gardant la responsabilité est un sujet extrêmement délicat.
L’ordonnance décrit clairement les 3 phases de l’acte de biologie médicale dont la phase pré-analytique qui comprend le prélèvement (L 6211-2). Il est également dit un peu plus loin que l’examen de biologie médicale est réalisé sous la responsabilité du biologiste médical (L 6211-7). Il est écrit dans cet article que la responsabilité ne pourrait s’appliquer qu’à certaines phases de l’examen. Lesquelles et dans quelles conditions ?
Ensuite, l’article L 6211-11, où apparaît pour la première fois dans le texte la notion de biologiste responsable (notion pas très claire définie plus loin) dit que ce biologiste responsable conserve la responsabilité pleine et entière de la totalité de l’examen même si une des phases est réalisée en dehors du laboratoire. N’y a-t-il pas là une contradiction ?
En ce qui concerne la phase pré-analytique et ses prélèvements, le législateur prévoit l’application de convention avec des tiers afin que ceux-ci respectent les procédures en vigueur au sein du laboratoire (L 6211-14 & L 6211-15). Que contiendront ces conventions ? Et qui aura la responsabilité de l’acte de prélèvement ? Exemple critique, à l’hôpital où les prélèvements sont effectués le plus souvent par les infirmières des services, qui sera responsable ? Le biologiste ou le Chef de Service Hospitalier ? Et les infirmières dites libérales ? L’activité libérale ne reconnaît elle pas la responsabilité pleine et entière de celui qui réalise un acte, une mission, un service, etc. et pour lequel il est rémunéré ? Si les infirmières n’ont plus la responsabilité de cet acte, est ce à nous « biologistes responsables » (toujours…) de les rémunérer ? Et si il y a une erreur de nom sur les tubes, sur la fiche de transmission ou autre documents et que nous n’ayons aucun moyen de nous en apercevoir (cela peut arriver), qui sera responsable ? Le préleveur « libéral » mandaté par le laboratoire ou le biologiste ?
L’article L 6211-17 demande à ce que le biologiste médical détermine au préalable du prélèvement les examens à réaliser et les procédures à appliquer. C’est parfaitement cohérent avec les articles précédents car cela permettra d’éviter un grand nombre d’erreurs de prélèvement et renforcera la responsabilité du biologiste sur la phase pré-analytique. Mais en pratique, comment fera t on ? Certains disent que les patients devront téléphoner au laboratoire pour prendre leur rendez vous… Comment les y obliger ? Comment déjà les informer de cette nouvelle règle ?
Un autre aspect crucial de ces articles est la déréglementation créée sur les relations entre infirmières libérales, pharmaciens et biologistes. Le ramassage et la collecte des prélèvements pourront s’effectuer partout, qu’il y ait labo ou pharmacies sur place. Certains ne vont pas manquer de s’engouffrer dans ces brèches pour accaparer l’activité du voisin, voir ouvrir un centre de prélèvements (« sites de laboratoire de biologie médicale » ?). Et là, il faut débattre de l’aspect financier de l’affaire…
L’article L 6211-21 empêche t il réellement toute rétrocession COMMERCIALE d’honoraires ou toute rétribution forfaitaire liée à un service rendu ? Les avis semblent très partagés sur cet aspect. Autant il est clair qu’on ne peut plus faire de remise ou ristourne (c'est-à-dire facturer moins cher que le tarif sécurité sociale), autant on peut légitimement se poser la question sur des indemnités fixes de transmission qui rémunèrent cet acte de transmission ? BIOMNIS et CERBA ont répondu non, mais d’autres biologistes semblent vraiment dire le contraire avec toutes les dérives que l’on peut imaginer.

UréeCréat
Biologiste"

vendredi 12 mars 2010

Norme ISO 15189 et Informatique des laboratoires d'analyses médicales : le COFRAC interpellé.

Amis Biologistes, bonjour.

Aujourd'hui, vous devriez toutes et tous avoir une copie de la Norme ISO 15189 sur votre bureau encombré et peut-être même sur votre table de chevet. Si vous êtes arrivés jusqu'à la page 32 (édition 2007), vous avez remarqué que l'Annexe B qui concerne le Système d'Information du Laboratoire (SIL) est devenue informative et non plus normative. Certains professionnels s'en sont émus et j'ai le plaisir de reproduire ci-dessous la lettre ouverte que l'un d'entre eux envoie à ce sujet à la section santé humaine du COFRAC . Vos réactions sont très attendues.

Bonne lecture.

GdM
(qui se bat avec son fournisseur de SIL)

"Madame, Monsieur,

J’ai pris connaissance, via le site du COFRAC, du projet de manuel d’accréditation des laboratoires de biologie médicale. Je souhaiterais réagir à travers cette lettre ouverte sur la portée de l’exigence 4.2.4.r relative aux Systèmes d’Information de Laboratoires présentée dans ce document.

Au sein de ce document de travail, l’annexe B de la norme ISO15189 est en effet présentée
comme « informative » et contenant des recommandations « que le LBM peut choisir d’appliquer ». Cette position, aux antipodes des ambitions originelles de la norme,qui présente au contraire l’annexe B comme « normative », me semble regrettable pour plusieurs raisons que je détaillerai ci-dessous après une brève remise en contexte.

Auditeur informatique expérimenté, mon premier contact avec la norme ISO15189 remonte à l’automne dernier lors d’une mission d’audit de sécurité que j’ai eu le plaisir de conduire sur les Systèmes Informatiques de Laboratoire d’un grand établissement hospitalier du Sud-Ouest de la France. A cette occasion, j’ai pu constater l’imbrication étroite (et qui n’ira qu’en grandissant dans les années à venir) entre le métier de la biologie médicale et l’informatique. J’ai également constaté avec une certaine satisfaction que les problématiques de contrôle interne informatique contenues dans l’annexe B constituaient un premier pas pour assurer la sécurité de l’information biologique et médicale sous quatre critères :

* Disponibilité : il s'agit, via les recommandations relatives à l’environnement(annexe B2), la récupération et le stockage des données (B6), la maintenance du système (B8), d’assurer que les informations biologiques et médicales relatives au patient seront disponibles en tout temps, y compris aux moments critiques de la vie, afin d'améliorer la qualité des soins.

*Intégrité : il s’agit, via les recommandations relatives à la sécurité du système(annexe B4), d’assurer la sécurité du patient en faisant en sorte que les informations biologiques et médicales le concernant ne seront pas susceptibles d’être altérées de façon accidentelle ou frauduleuse.

*Confidentialité : il s'agit, là encore via les recommandations relatives à la sécurité du système (annexe B4), d'assurer que la transmission des informations biologiques et médicales relatives au patient respectera son droit à la vie privée et à la dignité.

*Traçabilité : il s’agit, via les recommandations relatives à la saisie des données et enregistrements (annexe B5), d’assurer la sécurité des patients en pouvant établir formellement les responsabilités de chaque utilisateur dans la création / modification / suppression des informations biologiques et médicales.

A travers cette analyse de risques sommaire, on s’aperçoit donc que les risques associés à un Système d’Information de Santé non-maîtrisé et non-sécurisé peuvent dans certains cas mettre en danger la vie du patient : l’affaire des sur-irradiés d’Epinal nous en a malheureusement montré la preuve.

L’on m’objectera que l’annexe B est lourde (4 pages sur 40 consacrées à l’informatique contre une-demi dans le GBEA), que sa mise en oeuvre, ajoutée à celle du SMQ, est contraignante et dispendieuse, et que les contrôles mis en oeuvre seront de surcroît difficilement évaluables par des non-spécialistes en audit informatique.

Certainement, une partie de ces arguments est recevable : certaines recommandations sont ainsi sans doute exagérément détaillées (cf annexe B5 : saisie des données et enregistrements). D’autres dispositions, qui relèvent pourtant du bon sens le plus élémentaire, n’en apparaissent dès lors que plus étonnamment absentes (ex : aucune recommandation sur l’équipement antiviral des postes de travail afin de protéger le laboratoire d’attaques malveillantes).

Pour autant, peut-on, à l’heure où la cybercriminalité explose à travers le monde, écarter d’un revers de manche un ensemble de bonnes pratiques sous le seul prétexte qu’elles sont trop complexes à mettre en oeuvre, en particulier dans les petites structures ? Le nivellement par le bas est-il une stratégie acceptable dès lors que la santé publique est directement en jeu ?

Malgré leurs défauts et leurs insuffisances, nous serons tous d’accord pour reconnaître que les recommandations de l’annexe B nous interpellent sur des questions de fond, voire stratégiques pour les directeurs de laboratoire : comment assurer la continuité de mon activité en cas de sinistre ? Comment prévenir les risques de fraude ? Comment éviter de commettre des erreurs de diagnostic ?...

Pour toutes ces raisons, l’annexe B doit retrouver au sein du manuel d’accréditation COFRAC le statut normatif que lui confère originellement l’ISO15189. Montrons-nous donc à la hauteur des enjeux de la réforme de la biologie médicale française en fixant des objectifs ambitieux pour 2016 : pour cela, penchons-nous dès aujourd’hui sur chacune des recommandations contenues dans l’annexe et procédons à une analyse de risques approfondie sur la base des grandes lignes exposées ci-dessus, afin de n’extraire de ce document que la substantifique moelle. Ce travail, mené dans le cadre
d’une commission ad-hoc, associant des membres des différents collèges, permettra de :

* mieux cerner les risques associés à une non-conformité,
* d’apprécier pour chaque risque leur niveau d’acceptabilité,
* de déterminer pour chaque risque la meilleure stratégie à adopter dans le cadre de l’accréditation des laboratoires (recommandation normative ou informative).

L’intérêt du patient, « but unique » voulu par le rapport Ballereau, est à ce prix !

Rémi BOURDOT

Consultant
Diplômé de l’Institut d’Etudes Politiques de Paris
Certifié Information Systems Auditor (CISA)par l’ISACA
Certifié Information Systems Security Professional (CISSP) par l’(ISC)²
Membre de l’Association Française des Auditeurs Informatiques (AFAI)